Société des Amis de la Bibliothèque Forney



LES ACQUISITIONS DES AMIS POUR LA BIBLIOTHÈQUE FORNEY



LA MALACEÏNE, affiche de CHARLES LOUPOT

Acquisition réalisée fin 2013

Dans le cadre de l’activité de mécénat de la Société des Amis de la Bibliothèque Forney, nous avons récemment, à la suggestion de la conservation, fait l’acquisition en vente publique (pour la somme importante de 3.000 Euros), d’une rare et belle affiche que nous avons versée aux collections de la Bibliothèque Forney. M. Thierry Devynck, conservateur responsable du département des affiches, a bien voulu présenter cette affiche en exclusivité pour nos lecteurs et en détailler l’intérêt pour les collections de Forney.




Thierry Devynck Article de Thierry Devynck (Conservateur à la Bibliothèque Forney), paru dans la revue SABF (Sté des Amis de la Bibibliothèque Forney) 2014- Bulletin n° 198

La générosité de la Société des Amis de la Bibliothèque nous vaut une nouvelle acquisition remarquable, un exemplaire de Malaceïne, affiche fort peu courante d’un artiste rare lui-même sur le marché : Charles Loupot (1892-1962). L’œuvre de ce maître n’est qu’assez mal représentée dans les collections de notre maison et l’on ne réparera cette pauvreté que lentement, vu la rareté de l’offre, la modicité de nos moyens ordinaires et les prix presque toujours impossibles qu’atteignent ces pièces.
Monpelas, "Parfumeur-Chimiste" à Paris, propose à sa clientèle une spécialité, la Malaceïne, "crème philodermique" dont on trouve des réclames dans les journaux dès le début des années dix. Ces pleines pages, aux argumentaires fleuris dignes de César Birotteau, sont toujours très soignées. L’annonceur fait appel aux ateliers Draeger, qui lui offrent le dessinateur vedette Maximilian Fischer, dont le style sait coller à la dernière mode décorative : Wiener Werkstätte avant guerre, Arts déco après. La maison Monpelas a toujours le choix sûr et se contente du meilleur : elle fait appel à Charles Loupot en 1929 lorsqu’elle veut passer à un autre medium publicitaire, l’affichage.


La Maliceïne par Charles Loupot


Pourquoi ce recours si tardif à l’affiche ?

Pas forcément pour des raisons de coût, – l’effort publicitaire sur ce produit a toujours été soutenu –, mais peut-être parce qu’en France beaucoup d’annonceurs considèrent que ce medium serait trop lié à la grande consommation et qu’il s’adresserait moins bien à la clientèle distinguée que les catalogues commerciaux de luxe, les annonces dans des périodiques choisis ou les programmes de spectacles. Plutôt qu’à Cappiello ou à l’un de ses nombreux imitateurs, il est remarquable que l’annonceur s’adresse à Charles Loupot, l’affichiste élégant, abonné aux produits de luxe (automobiles Voisin, fourrures Canton), qui est à cette époque au sommet de sa gloire.

Loupot est le plus Art déco des affichistes français.
Il avait d’ailleurs dessiné en 1925 l’une des affiches de l’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes. Sans que ses feuilles n’y perdent jamais rien en vigueur et en clarté expressive, elles séduisent par leur rendu très pictural et le raffinement consommé de leur exécution, où l’art de la lithographie en couleurs atteint des sommets.

L’artiste s’applique à traiter le slogan qu’on lui soumet : "Malaceïne donne un teint de fleur".

La formule de son dessin est celle d’une femme-fleur ou d’une fleur-femme, motif combiné à celui du pot de crème de toilette, dans un effet qui évoque les superpositions photographiques. La femme est classiquement une rose, comme l’indique la couleur tendre du visage, la forme des feuilles et l’épine sur la tige.

Pour la typographie, Loupot retient le bleu de cobalt, couleur de la marque, mais plutôt que d’avoir recours au fade lettrage de l’emballage, il préfère un dessin fantaisie de son cru (qu’il emploiera d’ailleurs la même année dans ses affiches pour le poêle Mirus et la lame Mira) en lui ajoutant pour la circonstance des empattements qui rappellent le motif de l’épine (raffinement du détail, coutumier chez Loupot).

L’artiste n’aime pas les affiches à bords perdus lorsqu’elles sont à fond clair: Il les agrémente presque toujours d’un cerne dégradé qui soutient le cadre de la feuille et renforce l’impression générale.




Liens Charles Loupot


Charles Loupot Musée des Arts décoratifs

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